Marie NDiaye, Trois femmes puissantes.
Partout dans les articles et interviews qui m'étaient passés devant les yeux et dans les oreilles, on me disait que ces trois nouvelles différaient radicalement des précédents livres de Marie NDiaye, qu'on voyait un réel tournant dans son œuvre. Du coup j'avais un peu peur. C'est vrai, moi j'aime le style de Marie NDiaye, son univers habituel, alors si là c'est complètement différent, est-ce que je vais aimer ? Un seul moyen de le savoir.
La première de ces trois nouvelles est du Marie NDiaye pur jus, tout y est, pas l'ombre d'un soupçon de déception, son style impressionnant, son univers (relation ambiguë à la famille, dévoration, étrange voire fantastique accepté sans avoir besoin d'être expliqué, malaise permanent...), on est en terrain familier. Intrigante à l'extrême et toujours dérangeante, quelque part un peu frustrante, mais d'une façon formidable, en tout cas passionnante, cette première nouvelle annonce du bonheur pour la suite.
Les deux autres nouvelles sont effectivement légèrement différentes. Elles ne sont pas moins passionnantes, pas moins bien écrite non plus, certainement pas, mais disons un peu plus classiques, moins étranges (encore que). Mais enfin je ne trouve pas qu'elles soient vraiment en rupture totale par rapport à son style habituel. Elles sont toutes merveilleusement troublantes, et la dernière est monstrueusement (mais délicieusement) triste.
La deuxième nouvelle est la plus longue, et selon moi la moins palpitante. Mais toujours bonne. La tentation du fantastique est toujours présente, l'étouffement aussi, le malaise, on a le coeur qui se serre à la lecture, quelle écriture ! La fin me fait très fortement penser à quelque chose, mais quoi ? Je n'arrive pas à mettre le doigt dessus, pourtant j'ai l'impression d'avoir déjà lu ça quelque part, mais où ? Aidez moi s'il vous plaît, si vous lisez ce bouquin, dites moi à quel autre livre vous fait penser ce passage !
La troisième nouvelle est extrêmement belle, elle touche beaucoup et est très très bien écrite, ce qui n'est pas évident vu l'histoire. Elle est incroyablement bien écrite, sa longueur est pile poil ce qu'il fallait, elle est parfaite. Dans le thème et la fin, elle m'a évidemment fait penser à la nouvelle de Laurent Gaudé, "L'assaut", dans Eldorado, mais l'écriture est totalement différente. Elle laisse une impression très étrange, elle marque, ça c'est sûr, un malaise profond quand on referme le livre, et une envie de plus, d'encore. Décidément un excellent livre, j'avais un peu peur de ce que j'allais trouver et j'avais tort de me méfier, c'est un bouquin génial qui a chambardé mon monde. Jetez vous dessus !
Et dire qu'on refile le Nobel à Le Clézio alors qu'elle vaut des millions de fois mieux que ça !
Par lequel de ses livres penses-tu qu'il serait judicieux de commencer ?